Le groupe minier anglo-australien Rio Tinto a annoncé mardi la conclusion d'un accord avec le gouvernement de Guinée pour l'exploitation du plus grand site au monde de minerai de fer encore intact, Simandou, marqué par des années de controverse.

"Aujourd'hui est une étape importante dans le développement de cette mine de fer de première qualité, pour le bénéfice de tous les actionnaires et de la population guinéenne", a déclaré le PDG de Rio Tinto, Sam Walsh.

Le développement de ce site est "une priorité nationale qui va au-delà des mines et concerne les générations après la nôtre", a renchéri le président guinéen Alpha Condé, selon le communiqué du groupe minier.

Rio Tinto détient les droits d'exploitation pour la partie sud du site de Simandou, dans lequel repose du minerai de fer d'une valeur estimée à quelque 10 milliards USD au cours actuel. Rio Tinto doit trouver des partenaires pour participer au financement de ce gigantesque projet, qui nécessite la construction d'une ligne de chemin de fer sur 600 km pour transporter le minerai des montagnes de Simandou (sud-est) vers la côte atlantique, ainsi que d'un port en eau profonde et de centaines de km de routes. Le coût du projet - infrastructures de transport et exploitation des mines - est estimé à quelque 20 milliards de dollars US.

Rio Tinto et ses partenaires - le groupe chinois public Chalco et la Société financière internationale, une structure de la Banque mondiale d'aide au développement dans le secteur privé - ont approché une trentaine d'investisseurs potentiels, a indiqué une source proche du dossier à l'agence Dow Jones Newswires.

Parmi eux, des fonds souverains, des sociétés de capital-investissement, des agences de crédit à l'export et des clients intéressés par ce minerai, a précisé cette source. Ce projet va apporter à la Guinée 1,2 milliard de dollars US (878 millions d'euros) par an via impôts et taxes diverses, et injecter des milliards de dollars dans l'économie du pays, a assuré le PDG de Rio Tinto.

- Objet de plusieurs controverses -

Pour le président Alpha Condé, "avec de la transparence et des accords équitables, notre secteur minier a le potentiel de changer la Guinée". Les modalités du projet doivent être présentées d'ici quelques jours devant l'assemblée nationale guinéenne pour être approuvées.

Les partenaires mettront ensuite la dernière touche à une étude de faisabilité, afin de confirmer les coûts et le calendrier, une étape qui devrait prendre un an. La date du démarrage de l'extraction n'a pas été précisée. Le projet des mines Simandou, situées dans une région de montagnes et de forêts dans le sud-est de la Guinée, a été l'objet de plusieurs controverses.

A l'origine, Rio Tinto possédait les quatre concessions de Simandou.

Mais en 2008, le régime autoritaire de Lansana Conté (1984-2008), l'avait obligé à en rendre deux, attribuées à BSG Resources (BSGR), le bras minier du conglomérat appartenant au milliardaire franco-israélien Beny Steinmetz. BSGR, qui avait payé la concession 170 millions USD, en avait revendu la moitié deux ans plus tard, pour un montant 14 fois plus élevé, au brésilien Vale. Tous deux avaient créé le consortium VGB. Alpha Condé, élu à la tête de la Guinée en 2010 après des années de combat en exil ou en prison, avait remis à plat tous les permis d'exploitation minières accordés sous la junte de son prédécesseur.

Parmi les concessions retirées, celle attribuée à VBG. BSGR est soupçonné d'avoir versé des pots-de-vin d'au moins 3 millions de dollars US à l'épouse de Lansana Conté, ce que dément vigoureusement le groupe. Rio Tinto de son côté a porté plainte aux Etats-Unis contre Vale et Beny Steinmetz, estimant illégale la manière dont les concessions lui avaient été retirées en 2008. Le groupe a souligné que cette plainte ne visait en aucun cas l'Etat guinéen.