France : Nicolas Sarkozy estime qu'il n'a pas le choix et qu'il doit revenir en politique

Capture d'écran de France 2 montrant Nicolas Sarkozy lors de son interview le 21 septembre 2014. Capture d'écran de France 2 montrant Nicolas Sarkozy lors de son interview le 21 septembre 2014. Nicolas Sarkozy a plaidé dimanche avoir non seulement "envie" mais surtout ne pas avoir "le choix" : il doit revenir en politique face au PS et au FN et s'est livré à un véritable réquisitoire contre François Hollande, deux jours après avoir annoncé sa candidature à la présidence de l'UMP.

Rien n'a vraiment changé dans l'attitude de Nicolas Sarkozy, qui "remonte sur le ring" face à ses concurrents au sein de l'UMP, estime lundi la majorité des éditorialistes de la presse française. Pugnace, souvent crispé, parfois agressif : l'ancien chef de l'Etat est bel et bien de retour sur la scène politique. Dimanche soir sur France 2, il a exposé pendant près de quarante cins minutes les raisons de son retour par la case UMP, deux ans après sa défaite à l'élection présidentielle de 2012.

"Je ne veux pas que mon pays soit condamné entre le spectacle humiliant que nous avons aujourd'hui et la perspective d'un isolement total qui serait la perspective du Front National. Non seulement j'ai envie, mais je n'ai pas le choix", a-t-il déclaré. M. Sarkozy a présenté son credo: "Je suis venu pour créer les conditions d'une alternative crédible qui rassemble les Français bien au-delà des clivages habituels, droite, gauche, centre, écologistes, libéraux, qui n'ont plus aucun sens". Il a également balayé d'une simple phrase les doutes formulés au sein de son propre camp sur sa stratégie de revenir par la présidence de l'UMP, avec comme concurrents les députés Bruno Le Maire et Hervé Mariton: "Pourquoi cela ne serait pas digne de moi ?"

Hollande dans le viseur

M. Sarkozy a concédé quelques "erreurs" l'ayant conduit à la défaite en 2012, mais uniquement sur la forme. "Si j'ai perdu, c'était ma responsabilité", a-t-il reconnu, citant "par exemple" le travers "qui consiste à penser, quand on a beaucoup d'énergie et que l'on croit beaucoup en ses idées, ce qui est mon cas, que parfois on peut réussir seul. Or il n'y a pas de réussite individuelle". Mais "l'âge apporte peut-être un peu moins d'énergie mais plus de sagesse, de recul", a-t-il souri avant d'attaquer bille en tête François Hollande, oscillant entre le mépris ("au fond, il est son propre procureur", "il est temps qu'il se rende compte que c'est lui le président, pas moi" ou "un spectacle souvent humiliant") et un sévère réquisitoire politique.

"Je n'ai pas menti" en 2012, a-t-il notamment répété quatre fois. En revanche "que reste-t-il de la longue série d'anaphores, vous savez, 'moi président' ? Une longue litanie de mensonges", a-t-il asséné en référence au débat de l'entre-deux tours de 2012.

"Qui me rendra mon honneur ?"

Le probable futur président de l'UMP a cependant précisé souhaiter "naturellement" que François Hollande aille "au bout" de son mandat. Mais il l'a sévèrement attaqué sur de nombreux points de sa politique et a même raillé la nomination d'Emmanuel Macron, "un banquier" à Bercy, deux ans après le discours du Bourget ("mon ennemi c'est le monde de la finance"). Il a également abordé multiples affaires judiciaires dans lesquelles son nom est cité, balayant toutes les accusations. "Est-ce que vous croyez que si j'avais quelque chose à me reprocher, je viendrais m'exposer dans un retour à la politique comme aujourd'hui ? Est-ce que vous me prêtez deux neurones d’intelligence ?" a-t-il lancé, "en colère".

"Toute la campagne présidentielle, on a expliqué aux Français que j'étais mouillé dans l'affaire Bettencourt, que j'avais extorqué de l'argent à une vieille dame. Deux ans et demi d'enquêtes, quatre perquisitions, 22 heures d'interrogatoire. A l'arrivée : non lieu. Qui me rendra mon honneur ?", a-t-il tempêté. "L'affaire Karachi : dix ans d'enquêtes. On m'a même suspecté d'être complice de la mort de nos compatriotes - les pauvres. Aujourd'hui, je suis lavé. Qui me rendra mon honneur ? Est-ce que vous ne croyez pas que ceci sert certains desseins ?", a-t-il poursuivi.

M. Sarkozy, qui se voit en homme de "courage", a donc lancé les bases de la reconquête de l'UMP, dont la prochaine étape pourrait être un meeting jeudi à Lambersart (Nord). Il s'est même montré élogieux à l'endroit de ses principaux rivaux pour 2017, Alain Juppé et François Fillon, révélant avoir de "l'admiration" pour le premier et avoir travaillé "sans nuage" pendant cinq ans avec le second. Mais s'il assure ne pas penser à 2017, il prévoit déjà de recourir fréquemment au référendum.

Le "match" contre Juppé a "commencé"

Dimanche matin, Alain Juppé avait estimé que le "match" pour 2017 avait "commencé" et répété qu'il irait "jusqu'au bout" de sa candidature. Signe de sa détermination: il a publié sur son blog, en pleine interview de M. Sarkozy, un long texte détaillant ses priorités. Sur Twitter, l'un des proches conseillers du maire de Bordeaux Gilles Boyer a ironisé : nicolas sarkozy, un partenaire, un ami, un compagnon". Tout aussi déterminé à concourir, François Fillon a déclaré dimanche qu'il n'avait "pas le culte des sauveurs".

Pendant et après l'entretien, les adversaires de M. Sarkozy s'en sont donné à coeur joie : "Non, Sarko n'a pas changé" (Louis Aliot, vice-président du FN, sur Twitter). "Je n'ai vu ni projet, ni proposition. Sur le fond, cela n'apporte rien aux Français" (Yves Jégo, candidat à la tête de l'UDI, sur BFMTV). "Sur le fond, à part critiquer #Sarkozy n'a avancé aucune proposition ni aucune perspective, il est toujours autocentré sur lui. #SarkoLeRetour" (Yann Galut, député PS du Cher, sur Twitter). "Un ton revanchard contre Hollande, des piques contre ses rivaux #UMP et même une attaque contre les journalistes #Sarkozy #inchangé" (François de Rugy, député EELV de Loire-Atlantique, sur Twitter).