La guerre se poursuit à Gaza, l'aéroport de Tel Aviv déserté

Des juifs ultra-orthodoxes à l'aéroport Ben-Gourion de Tel Aviv, devant l'écran des vols affichant de multiples annulations.Des juifs ultra-orthodoxes à l'aéroport Ben-Gourion de Tel Aviv, devant l'écran des vols affichant de multiples annulations.

Les hostilités entre le Hamas et Israël, qui ont fait au moins 639 morts côté palestinien et 31 côté israélien depuis le 8 juillet, ne connaissaient aucun répit mercredi malgré l’appel ferme de Ban Ki-moon à «arrêter de combattre», et ont contraint les grandes compagnies aériennes à annuler leurs vols vers Tel Aviv.

L’Agence européenne de la sécurité aérienne (AESA) a recommandé à l’ensemble des compagnies européennes, au plus tard mercredi, de ne plus desservir jusqu’à nouvel ordre l’aéroport international Ben-Gourion de Tel Aviv. Cette décision fait suite à celle prise par l’Agence fédérale américaine de l’aviation (FAA) d’interdire pour 24 heures aux compagnies américaines de voler vers ou depuis Israël, après qu’un tir de roquette de Gaza a atteint une localité proche de l’aéroport. C’est la première fois depuis la guerre du Golfe en 1990-1991 que de telles mesures touchent Israël.

Alors que de très nombreux vols ont été annulés par des compagnies européennes et nord-américaines comme Air France, Lufthansa, EasyJet ou Delta, le ministre israélien des Transports Israël Katz a estimé qu’il n’y avait «aucune raison» de prendre de telles mesures. Benyamin Nétanyahou «a parlé mardi soir avec le secrétaire d’Etat américain John Kerry et lui a demandé d’agir pour rétablir les vols des compagnies américaines vers Israël», a indiqué à l’AFP l’entourage du Premier ministre.

Mais Kerry, au Caire pour tenter d’arracher un cessez-le feu dans la bande de Gaza, a affirmé par téléphone à Nétanyahou que cette interdiction était simplement motivée par la protection des citoyens américains. Il a précisé que les Etats-Unis décideraient de son maintien ou non d’ici 24 heures, a déclaré la porte-parole du département d’Etat Jen Psaki. Le milliardaire américain Michael Bloomberg a bravé l’interdiction en annonçant qu’il prenait l’avion pour Tel Aviv en solidarité avec Israël.

Après une visite en Egypte, médiateur traditionnel entre Israël et le mouvement islamiste Hamas, le patron de l’ONU Ban Ki-moon a réclamé à Tel Aviv l’arrêt des hostilités. «Mon message aux Israéliens et aux Palestiniens est le même : "Arrêtez de combattre, commencez à parler. Traitez à la racine les causes du conflit"», a-t-il souligné, en présence de Nétanyahou.

L’objectif affiché d’Israël est de désarmer le Hamas, qui contrôle l’enclave palestinienne, faire cesser ses tirs de roquettes, détruire ses tunnels et arrêter les «infiltrations» en Israël des combattants de Gaza. Le Hamas, lui, réclame la levée du blocus israélien de Gaza, en place depuis 2006, la libération de prisonniers et l’ouverture de la frontière avec l’Egypte. Nétanyaho est resté sur ses positions, appelant la communauté internationale à considérer le Hamas comme le seul responsable du bain de sang : «La population de Gaza est la victime du régime brutal du Hamas.»

Arithmétique sanglante

 

Sur le terrain, les frappes israéliennes ne faiblissaient pas. Selon les secours palestiniens, le bilan a atteint au moins 636 morts, un chiffre difficile à vérifier compte-tenu du chaos régnant à Gaza où des corps de personnes décédées les jours précédents continuent d’être retrouvés dans les décombres. Quelque 3 700 personnes ont été blessées et 100 000 déplacés ont trouvé refuge auprès de l’ONU.

Mercredi matin, les forces israéliennes ont abattu un Palestinien de 32 ans dans le village de Hussan en Cisjordanie, ont annoncé à l’AFP des sources de sécurité palestiniennes. La veille, les bureaux de la chaîne d’information qatarie Al Jezira, très critiquée en Israël pour sa couverture des événements, a vu ses bureaux touchés par des tirs de sommation à Gaza. Au seizième jour des opérations, des quartiers entiers de Gaza paraissaient annihilés, en particulier Chajaya où les frappes ont fait au moins 70 morts dimanche.

Dans un discours télévisé au ton inhabituellement dur, le président palestinien Mahmoud Abbas a promis de «poursuivre tous ceux qui commettent des crimes contre notre peuple, quel que soit le temps que cela prendra». Réunie en urgence dans la nuit de mardi à mercredi à Ramallah (Cisjordanie), la direction palestinienne a appelé à des «manifestations populaires générales de solidarité avec Gaza et la Résistance».

A New York, le représentant palestinien à l’ONU, Ryad Mansour, a accusé, dans un discours empreint d’émotion, la communauté internationale d’avoir «failli à son obligation de protéger les civils en temps de guerre». La Jordanie a proposé au Conseil de sécurité un projet de résolution appelant à «un cessez-le-feu immédiat», selon des diplomates. L’Union européenne a enjoint Israël à une opération «proportionnée», tout comme le chef de la diplomatie française Laurent Fabius. Elle a parallèlement appelé au désarmement de «tous les groupes terroristes» à Gaza.

Obsèques militaires en Israël

Côté israélien, depuis le début des hostilités, quelque 1 700 impacts de roquettes ont été comptabilisés, et environ 420 autres projectiles ont été détruits en vol. Des combattants du Hamas, passant par leurs tunnels, ont aussi porté le combat sur le sol d’Israël à plusieurs reprises depuis jeudi.

L’armée israélienne a fait état de 185 «terroristes» tués depuis le 17 juillet mais elle enregistre aussi des pertes significatives dans ce qui était à l’origine une campagne aérienne lancée le 8 juillet mais qui s’est muée jeudi en opération terrestre. Outre deux civils, 29 soldats israéliens ont été tués et les obsèques rythmaient les informations télévisées. Plus de 6 000 personnes ont assisté mardi au cimetière d’Ashkelon (sud d’Israël) aux funérailles de Jordan Bensemoun, 22 ans, un soldat franco-israélien tué lundi à Gaza.

Au sein du gouvernement, la colombe Tzipi Livni comme le faucon Naftali Bennett ont exprimé leur opposition à tout cessez-le feu. Les efforts diplomatiques doivent encore se poursuivre dans les prochains jours pour arracher une trêve. Ban Ki-moon doit venir à Jérusalem mercredi, date à laquelle John Kerry est attendu en Israël.

AFP