Sans attendre les promesses de financement du Nord, plusieurs pays africains expérimentent déjà des pistes concrètes pour financer la transition climatique.

Réunis au Cap, en Afrique du Sud, du 24 au 26 octobre derniers, les pays africains ont lancé le premier dialogue structuré du Fonds vert pour le climat. C'est un signal politique fort, l'Afrique veut se montrer unie pour la COP22 et proposer des solutions africaines adaptées aux réalités de chaque pays.

Appliquer des stratégies réalistes

« L'Afrique doit avancer d'elle-même face aux changements climatiques néfastes pour l'agriculture et l'élevage. Nous devons proposer des programmes, et ne plus s'engager pour s'engager, mais s'engager pour l'action, car, aujourd'hui, nous savons où nous devons aller, quelles sont les stratégies à mettre en œuvre, et il faut que les ressources financières puissent suivre », a martelé Aminata Mbengue Ndiaye, la ministre sénégalaise de l'Agriculture et de l'Élevage.
En 2014, elle a dû faire face au retard des pluies. « Nous avons immédiatement changé le programme agricole, se souvient-elle. Nous avons planté des semences à cycle court pour avoir de bonnes productions et pallier le désastre. Et nous avons eu de bons résultats. Nous avons également investi dans la mécanisation de l'agriculture et dans la recherche. Et nous avons travaillé avec des partenaires privés. »
De son côté, avec 20 millions d'hectares, le Soudan est l'un des plus grands pays africains, avec un grand potentiel agricole. Malheureusement, la plupart des terres sont en zones non irriguées. Avec un impact climatique de ce fait très important. Si l'autosuffisance alimentaire est atteinte malgré tout, le problème réside dans la gestion des saisons de pluies qui sont très aléatoires. « Cette saison le budget soudanais accordé à l'agriculture a atteint 9 % et nous comptons bien faire plus », confie Ibrahim Adam Ahmed El Khairi, le ministre de l'Agriculture et des Forêts au Soudan.

Vers des solutions de partenariats public-privé

Le Gabon n'a quant à lui pas encore atteint l'autosuffisance alimentaire, mais il semble être sur la bonne voie. Son association en 2010 avec la société singapourienne OLAM y est pour beaucoup. Le spécialiste de l'agroalimentaire fournit matériel et engrais pour certains programmes, comme Graine, qui incite la population à travailler la terre en contrepartie du paiement de coopératives. Les cultures concernées sont le manioc, la banane plantain, la tomate et le piment.
La Côte d'Ivoire a aussi opté pour un partenariat public-privé, avec le groupe agroalimentaire Mars notamment, qui utilise du cacao ivoirien dans ses productions. Mars investit par ailleurs pour la recherche. Le cacao est une culture très importante en Côte d'Ivoire, développée depuis plus de trente ans, mais qui aujourd'hui est menacée par la déforestation. Le programme mené par les experts, comme ceux du Centre international pour la recherche en agroforesterie, est de réhabiliter les vergers en passant d'un système traditionnel à un système où l'on utilise plus d'arbres dans le paysage du cacao. Les petits producteurs n'utilisent pas d'engrais et ce type de production se fait au détriment des sols et a donc une limite. « Il faut arriver à une production durable. Une de nos approches consiste notamment en l'introduction de la technologie de greffage qui consiste, à partir de vieux vergers, à utiliser des colonnes améliorées qui sont très performantes et qui permettent de remplacer un matériel végétal vieux et inadapté », explique Christophe Kouame, spécialiste du Centre international pour la recherche en agroforesterie. « C'est une première de vouloir positionner l'adaptation climatique au sein des débats sur le changement climatique », soutient M. Akhannouch.

Peut-être y aura-t-il plus d'humanité dans les négociations. Rien n'est sûr, mais l'Initiative AAA semble être une solution pour le climat, mais aussi pour les paysans et les populations les plus démunies.  L'action est en marche.

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