Pour la première fois depuis le début du quinquennat de François Hollande, un président d'Afrique subsaharienne a les honneurs d'une visite d'Etat en France. Ibrahim Boubacar Keïta, le président malien, est reçu durant deux jours à Paris. Après un dîner à l'Elysée mercredi 21 octobre, il ouvrira demain la conférence des donateurs impulsée par Paris et qui aura lieu au siège de l'OCDE. Il se rendra ensuite à l'ossuaire de Douaumont dans l'Est pour saluer la mémoire des soldats maliens tombés pour la France.

Cette première visite d'Etat du président IBK se veut le reflet de l'amitié particulière qui unit Paris et Bamako. Une relation forte explique une source diplomatique française, qui s'est traduit par l'intervention française Serval en janvier 2013 pour stopper l'avancée des jihadistes vers le sud du pays. François Hollande et Ibrahim Boubacar Keïta entretiennent des liens personnels, souligne-t-on dans les coulisses de l'Elysée. Le président IBK est venu en France à plusieurs reprises, il était notamment là aux côtés de François Hollande lors de la marche du 11 janvier dernier qui a suivi l'attentat contre le journal Charlie Hebdo. Pour Paris, le Mali est un partenaire « fidèle ». Comme preuve de cette amitié, François Hollande a remis à son homologue les insignes de la Grand-Croix de la Légion d’honneur mercredi 21 octobre.

Autre témoignage du soutien de Paris au Mali, la conférence impulsée la France pour débloquer des fonds en faveur de la relance de l'économie du pays. Elle aura lieu ce jeudi, le 22 octobre, à l'OCDE (l'Organisation de coopération et de développement économiques) et réunira investisseurs et partenaires internationaux du Mali autour des membres du gouvernement malien qui ont fait le déplacement à Paris. En prévision de cette conférence, intitulée « Bâtir un Mali émergent » François Hollande a annoncé mercredi que Paris débloquerait 360 millions d'euros d'aide au pays, sous forme de prêts et de dons (à hauteur de 50 %). Dont 80 millions d'euros pour le nord. Une somme qui s'ajoute déjà aux quelque 300 millions qu'avaient déboursés Paris pour la période 2013-2015 (en prêts et dons).

Cette journée pour la reconstruction et la relance du Mali s'inscrit officiellement dans la dynamique de l'accord de paix signé le 20 juin dernier. Des représentants des groupes signataires de l'accord de paix seront d'ailleurs exceptionnellement présents à l'OCDE, pour une photo de famille très symbolique. Deux ans après la conférence de Bruxelles en mai 2013 qui avait marqué l'engagement des partenaires du Mali, en faveur de la reconstruction du pays, les besoins, dans la partie nord en particulier, restent énormes. Infrastructures à reconstruire, écoles à réhabiliter, centres de santé à rééquiper, alimentation électrique à rétablir, sécurisation des routes, la liste des urgences est longue.

Les ONG qui opèrent au Mali attendent elles toujours en particulier la reconstruction de la piste d'atterrissage de Kidal. Elles viennent d'écrire une lettre ouverte aux bailleurs de fonds pour que les réparations menées par la Minusma et qui sont en cours depuis neuf mois s'accélèrent et se terminent. Pour l'heure, aucun avion civil ne peut se poser. Seul un hélicoptère assure des rotations depuis Gao, ce qui rend très difficile l'acheminement de l'aide humanitaire dans la zone.

Tournée vers l'avenir du Mali, cette visite d'Etat sera aussi l'occasion pour le président malien de célébrer la mémoire des quelque 17 000 Maliens morts pendant les deux guerres mondiales. Ibrahim Boubacar Keïta, dont l'arrière grand-père est mort pour la France pendant la Première Guerre mondiale, se rendra ce jeudi sur le site de l'Ossuaire de Douaumont, près de Verdun, dans l'est de la France.

Ibrahim Boubacar Keïta a affirmé lors de son premier jour en France ne jamais avoir eu de « relation d'affaires » avec l'homme d'affaires français Michel Tomi, mis en examen dans un dossier de fraude fiscale présumée concernant notamment l'achat de l'avion du président malien. Les policiers français cherchent à savoir dans quelle mesure l'homme d'affaires a participé à l'achat du Boeing présidentiel malien, une transaction estimée à 20 milliards de francs CFA (environ 30,5 millions d'euros). Cette acquisition a également été épinglée par le Bureau vérificateur général, autorité malienne indépendante, qui a dénoncé des pratiques de surfacturation, de détournement de fonds publics, de fraude, de trafic d'influence et de favoritisme.

Par Marie-Pierre Olphand

Mamadou Lamarana LY pour ma guinee.com