Ils protestent contre un projet de révision constitutionnelle qui permettrait au président Blaise Compaoré de briguer un 5e mandat. Prévu jeudi, l'examen du texte a été annulé. Les manifestations monstres duraient depuis plusieurs jours à Ouagadougou. Elles ont dégénéré, jeudi 30 octobre, lorsqu’une foule de plusieurs milliers de personnes a pris d'assaut l'Assemblée nationale et la télévision publique, laquelle a cessé d'émettre.

Les députés devaient examiner un projet de révision constitutionnelle permettant au président Blaise Compaoré, depuis vingt-sept ans au pouvoir, de briguer un cinquième mandat. Le Parlement est en flammes, et l'examen du texte a été suspendu par le gouvernement, qui a appelé la population « au calme et à la retenue ». Selon Radio France Internationale, le frère du président, François Compaoré, a été arrêté à l'aéroport. Blaise Compaoré, lui, est introuvable.

LA FAMILLE DU PRÉSIDENT EN LIGNE DE MIRE

A la mi-journée, plusieurs centaines de manifestants faisaient face aux forces de l'ordre à quelques centaines de mètres du palais présidentiel. Selon l'agence de presse Reuters, les gardes de la maison de François Compaoré, proche du palais, ont ouvert le feu sur la foule. Au moins une personne est morte, selon un bilan provisoire. La mairie et le siège du parti présidentiel ont également été incendiés à Bobo Dioulasso, deuxième ville du pays. La police, qui avait établi un cordon de sécurité autour du Parlement et de la télévision publique, avait tiré en l'air avant de plier sous la pression et de se retirer.

Le site d'information Burkina 24 fait part de l'évolution de la situation en direct sur son compte Twitter, et publie plusieurs photos montrant la violence dans les rues de la capitale :

   Vote sur la réforme constitutionnelle : le Burkina retient son souffle

    Ce jeudi est une journée à haut risque au Burkina Faso. Le députés doivent en effet examiner un projet de réforme constitutionnelle qui permettrait à l'actuel président Blaise Compaoré de se maintenir au pouvoir. Or, cette perspective suscite la colère d'une partie de la population. Par milliers, ces derniers jours, ils sont descendus dans les rues de la capitale. Mardi, notamment, une foule immense était rassemblée à Ouagadougou. Des heurts ont éclaté entre jeunes en colère et forces de l'ordre. Certains craignent que de nouveaux affrontements se produisent ce jeudi. De nombreux ténors de l'opposition ont appelé la population à se mobiliser. Ainsi Augustin Blaise Hien, secrétaire général de la Confédération nationale des travailleurs du Burkina (CNTB). 'Le pouvoir du capitaine Blaise Compaoré se révélant comme une dictature militaire constitutionnalisée, il nous faudra continuer à nous battre, camarades !', a-t-il lancé à ses partisans. Les manifestants ont prévu de 'marcher sur l'Assemblée' pour empêcher le vote. Le bâtiment a été placé sous haute protection policière. Blaise Compaoré est âgé de 65 ans. Il est à la tête du pays depuis 1987. Le projet de loi étudié par les députés, vise à modifier la Constitution, pour porter de deux à trois le nombre maximum de quinquennats présidentiels. Si le texte est adopté, Compaoré pourrait briguer en 2015, un nouveau mandat.

« LE PRÉSIDENT DOIT TIRER LES CONSÉQUENCES »

Blaise Compaoré dirige ce pays pauvre du Sahel depuis 1987 et l'assassinat du capitaine Thomas Sankara, avec qui il avait pris le pouvoir quelques années auparavant. Il a déjà fait modifier par deux fois la Constitution pour se maintenir au pouvoir.

Depuis des mois, son gouvernement laissait croire qu'une nouvelle révision ferait l'objet d'un référendum. Depuis l'annonce d'un passage par la voie parlementaire, il y a une semaine, la mobilisation populaire ne faiblit pas. Mardi, des centaines de milliers de personnes – un million, selon l'opposition – étaient descendues dans la rue à Ouagadougou pour dénoncer un « coup d'Etat constitutionnel ». Le gouvernement avait, jusqu'ici, autorisé les manifestations et s'était abstenu de les réprimer.

« Le président doit tirer les conséquences » des manifestations, a lancé jeudi Bénéwendé Sankara, l'un des leaders de l'opposition, qui, avec d'autres, avait appelé la population à « marcher sur le Parlement ».