Au Congo-Brazzaville, dans cinq jours doit se tenir un référendum pour un changement de Constitution. Les opposants ont appelé à des marches, ce mardi 20 octobre 2015, dans plusieurs villes du pays pour protester contre ce qu’ils estiment être une manœuvre du pouvoir pour que le président Sassou-Nguesso puisse se représenter l’année prochaine.

« Il y a des gens, donc l’opposition radicale, qui avaient promis une marche vers le Palais présidentiel aujourd’hui. Il est logique qu’en face la force publique se mette en place pour garantir la tranquillité des citoyens, leur libre circulation et la continuité de l’Etat. Il y a des lieux qui ont effectivement été, pour des raisons d’ordre public, interdits- y compris à la majorité présidentielle - et puis il y a des lieux qui ont été désignés pour tout le monde, pour les actes ou les actions de campagne », explique Thierry Moungalla, le porte-parole du gouvernement. Il affirme que cette marche de l’opposition a été interdite dans certains quartiers de la capitale. A Bacongo, le quartier sud de Brazzaville, fief de l’opposition, quelques barricades ont été érigées, des pneus brûlent ici et là.

Malgré les appels des autorités pour que les Congolais aillent au travail, Brazzaville est ville morte ce mardi. Ses embouteillages habituels ne sont pas visibles. Les artères sont vraiment désertes et les habitants sont restés chez eux. Un hélicoptère a été vu au-dessus de Bacongo larguant des gaz lacrymogènes. Des coups de feu ont aussi été entendus. Les jeunes militants ont été dispersés, mais reviennent de temps en temps discrètement sur les lieux. Selon des sources hospitalières, citées par l'AFP, il y aurait au moins huit blessés dont six par balle.

On constate aussi une forte présence des agents de police et de la gendarmerie dans ces quartiers, comme le signale Paul Marie Mpouélé, le coordinateur de la plateforme d'opposition, Frocad : « Très tôt ce matin, comme les militants se déplaçaient par groupes, la police n’a pas hésité à réprimer, à pourchasser à coups de gaz lacrymogène, à coups de balles. Nous avons déjà lancé des mots d’ordre : "Manifestation strictement pacifique et non violente". Nous réitérons ce mot d’ordre ! Nous appelons les militants à manifester, mais pacifiquement et de manière non violente. C’est notre droit de pouvoir exprimer notre point de vue ».

Des évènements qui font réagir l'ex-ministre devenu opposant, Guy-Parfait Kolela du MCDDI. Il dénonce les restrictions de libertés : « Aujourd’hui, nous avions programmé un meeting. Donc les militants, ce matin, ont convergé à certains endroits, comme nous avons indiqué, de façon à ce qu’on les dirige vers l’endroit du meeting. Mais notre surprise a été grande de constater que les policiers ont chargé les militants à coups de gaz lacrymogène. Donc, il y a des barricades un peu partout. Nous lançons un appel à la désobéissance civile sur toute l’étendue du territoire. Nous n’avons pas le choix ».

Internet, les SMS ont été suspendus et RFI serait aussi coupée. Faux, rétorque le gouvernement. C’est certainement un problème technique, affirme-t-il. « Il y a une maintenance qui est faite et qui ne touche pas que l’émetteur qui concerne RFI. Quant à l’Internet ou le téléphone, je crois que le Congo, quand il y a une espèce de psychose qui est créée comme ça, chacun veut téléphoner, chacun veut surfer, chacun veut envoyer un SMS et malheureusement dans ces cas-là il y a souvent un engorgement. Malheureusement, cela arrive avec des réseaux assez fragiles », a expliqué à RFI le porte-parole du gouvernement, Thierry Moungalla.

Lundi, le secrétaire général du Parti congolais du travail (PCT), le parti au pouvoir, appelait au calme et à la sérénité. Il n’a de toute évidence pas été entendu. L’opposition le martèle : elle ne veut pas du référendum de dimanche prochain qui est censé ouvrir la voie à un changement de Constitution. Dans le même temps, dans le nord et au centre de la ville, des partisans du oui et du référendum se sont réunis pour manifester. Ils se sont regroupées près d'un rond-point dans le centre-ville et ont, avec eux, des tambours.

RFI/Bertrand Haeckler

Mamadou Lamarana LY pour maguinee.com