La lutte pour le respect des droits fondamentaux des femmes aurait dû mener nos diplomates occidentaux, et particulièrement nos diplomates européens, un peu trop pressés de suivre l'allié américain qui fait parfois preuve d'aveuglement idéologique, a adopter une politique différente concernant les "révoltes du Printemps Arabes".

Il est dommage qu'ils aient aidé indirectement et par aveuglement les jihadistes en aidant au renversement de Chefs d'Etat certes autoritaires mais qui assuraient néanmoins leurs droits fondamentaux aux femmes et le respectaient des minorités .Même s'il est vrai que cette menace servait sans doute de prétexte pour réprimer les opposants, les conséquences de ces "Printemps" nous rappelle qu'entre deux maux il convient de choisir le moindre. En mettant à part la cas de la Tunisie ou la société civile s'est immédiatement mobilisé pour obliger les islamistes d'Ehnnada a partager le pouvoir et a préserver tous les acquis sur les droits des femmes.

Nous avons choisi le pire en créant le chaos en Libye, en laissant ainsi l'opportunité aux milices islamistes radicales de faire avancer leur agenda, de faire régner la terreur et d'étendre le jihad au Mali et dans le Sahel. Nous avons choisi le pire en Egypte, ou après la chute d'Hosni Moubarak, les islamistes sont arrivés démocratiquement au pouvoir en masquant leur agenda. Il a fallu une forte mobilisation de la rue pour destituer Mohammed Morsi et ce n'est à son tour que par la répression que le nouveau président, le Marechal Al Sissi tentera de préserver les valeurs fondamentales d'un Islam ouvert, protecteur des valeurs universelles et des droits des femmes. Nous avons créé le pire en Syrie. Nous nous sommes encore trompés d'ennemis ; nous avons encore une fois sous estimé la menace jihadiste en n'hésitant pas à fournir des armes aux opposants sois disant modérés.

Nous avons maintenant le pire : un Califat entre la Syrie et l'Irak

Mossoul la ville chrétienne sous le contrôle des jihadistes, les chrétiens, les Yézidis priés de choisir entre partir, être exécutés ou payer l'impôt des "infidèles". Des milliers de femmes et d'enfants jetés de force sur les routes pour échapper au génocide programmé d'Abou Bakr Al Baghdadi. Il a semblé plus important aux yeux des dirigeants occidentaux de renverser Bachar Al Assad qui menait une répression féroce contre les islamistes radicaux en restreignant la liberté d'expression, mais protègeait les droits fondamentaux des femmes et les minorités religieuses.

Ils ont préféré fermer les yeux sur les massacres des Chrétiens de Malloula commis par Al Nostra et les jihadistes venus du monde entier, attirés par la propagande anti Assad.

Depuis longtemps pourtant, les Kurdes syriens du PYD réclament de l'aide, des armes pour lutter plus efficacement contre les extrémistes. Nous les avons ignoré, nous ne leur avons pas permis de s'asseoir à la table des négociations à la conférence de Genève.

Maintenant L'EI a installé son Califat et menace même jusqu'au Liban ou des troupes se sont déjà déployées sur la frontière. Les femmes sont devenues des ombres, l'accès à l'éducation va bientôt leur être interdit et tout ceci avec des méthodes barbares, digne du Moyen Age.

Et pourtant nous avons déjà connu une telle situation quand les taliban étaient au pouvoir en Afghanistan... Cela aurait du nous servir d'exemple.

Il est important de comprendre que tous ces jihadistes sont les mêmes , qu'ils agissent différemment selon la configuration géopolitique mais leur but est le même... Au Nigeria, Boko Haram fait régner la terreur. L'enlèvement de ces jeunes filles dans leur école qui a mobilisé a juste titre le monde entier, comme la situation de ces pauvres afghanes sous les talibans, ou encore les assassinats de ces femmes parlementaires récemment en Somalie par les Shebab, devraient inciter nos hommes politiques et nos diplomates à placer le respect du droit des femmes et celui des minorités au coeur de leur réflexion géostratégique.

C'est pour cela qu'il est important au Moyen Orient d'aider les kurdes. Même au prix de la création d'un Etat. Ils défendent nos valeurs. Apres tout ils le mériteraient. Les Peshmergas sont pour le Moyen Orient peut être le vrai rempart contre l'islamisme radicale... Les Kurdes peuvent être le ciment d'une nouvelle alliance entre l'Iran et les Etats Unis à laquelle l'Europe doit contribuer. L'Irak, la Syrie et la Turquie qui n'ont aucune envie de voir s'installer un Califat à leur porte ne pourront qu'accepter et aider les Kurdes à prendre leur autonomie. Une façon également de remettre la défense du droit des femmes au cœur de la politique.

Patricia Lalonde

Secrétaire Générale de l'ONG MEWA, chercheuse à l'IPSE