Le Hamas a rejeté la proposition de médiation égyptienne acceptée par le gouvernement israélien. La direction politique du mouvement islamiste semble divisée sur la recherche d’une issue à la crise. Les contacts diplomatiques en vue d’un cessez-le-feu se poursuivent.Israël: Paris déconseille de se rendre dans les villes proche de Gaza.

Le répit aura été de courte durée. Après avoir observé une trêve de six heures, l’aviation israélienne a repris mardi 15 juillet dans l’après-midi le bombardement de la bande de Gaza. Une frappe aérienne a visé la ville de Khan Younès, dans le sud de l’enclave, et une autre le quartier de Zeitoun, dans l’est de la ville de Gaza. « Après que le Hamas et le Djihad islamique ont rejeté la proposition égyptienne pour un cessez-le-feu et tiré des dizaines de roquettes sur Israël, le premier ministre et le ministre de la Défense ont décidé d’agir avec fermeté contre des cibles terroristes à Gaza », a indiqué un responsable gouvernemental israélien, s’exprimant sous couvert d’anonymat.

La branche militaire du Hamas avait auparavant rejeté la proposition égyptienne acceptée par le gouvernement israélien. « Un cessez-le-feu sans parvenir à un accord est exclu. En temps de guerre, on ne cesse pas le feu pour ensuite négocier » expliquait mardi matin Fawzi Barhoum, un porte-parole du Hamas à Gaza, tandis que les Brigades Ezzedine al-Qassam qualifiaient la proposition égyptienne de « reddition » et menaçaient d' « intensifier » leurs attaques contre Israël. Le mouvement islamiste exige l’arrêt des bombardements israéliens, la fin du blocus de Gaza en place depuis 2006, l’ouverture du poste frontière de Rafah avec l’Égypte et la libération des prisonniers arrêtés de nouveau après avoir été relâchés en échange contre du soldat israélien Gilad Shalit en 2011. Le Hamas a par ailleurs fermé hier son poste de contrôle frontalier avec Israël, empêchant toute entrée et sortie de l’enclave.

Netanyahou veut « démilitariser » Gaza

 « Si le Hamas n’accepte pas la proposition égyptienne, comme c’est le cas actuellement, Israël aura toute la légitimité internationale pour élargir ses opérations militaires afin de ramener le calme nécessaire » avait averti Benyamin Netanyahou lors d’une rencontre avec le ministre allemand des Affaires étrangères Frank-Walter Steinmeier au ministère de la Défense à Tel-Aviv.

« Nous avons répondu à la proposition égyptienne pour fournir une occasion de traiter de la démilitarisation de la bande de Gaza" a-t-il ajouté, en faisant allusion aux "missiles, aux roquettes et aux tunnels" dont dispose le Hamas dans l’enclave palestinienne sous blocus israélien depuis 2011.

Tôt dans la matinée de mardi, le cabinet de sécurité israélien avait voté en faveur de l’initiative égyptienne prévoyant l’entrée en vigueur d’une trêve mardi à compter de 6 heures GMT mardi. Le cessez-le-feu proposé par Le Caire prévoyait un « arrêt total des hostilités aériennes, maritimes ou terrestres » et l’ouverture dans la foulée de négociations sur l’entrée des biens et des personnes dans l’enclave palestinienne sous blocus.

192 morts en une semaine

 

L’Égypte proposait également d’accueillir, sous quarante-huit heures, deux délégations palestinienne et israélienne de haut niveau pour ouvrir ces discussions. L’initiative égyptienne a reçu le soutien de la Ligue arabe, des États-Unis et du président palestinien Mahmoud Abbas.

Partisan d’une opération militaire de courte durée, le premier ministre israélien a confié à l’armée la tâche de détruire un maximum d’infrastructures militaires du Hamas et du Djihad islamique, en particulier les capacités de lancement de roquettes, mais seule une opération au sol pourrait atteindre les tunnels creusés en zone urbaine.

En une semaine, les bombardements israéliens de la bande de Gaza ont fait 192 morts et près de 1.300 blessés, selon un dernier bilan des services de secours. Selon l’armée israélienne, environ 840 roquettes ont atteint Israël depuis le début des hostilités et près de 200 ont été interceptées par la défense antiaérienne. Ces tirs n’ont fait quatre blessés graves, une illustration de l’efficacité du système antiaérien mis en place en 2011 sur le territoire israélien.

La Turquie et le Qatar dans le jeu diplomatique

La direction politique du mouvement islamiste semble divisée sur la recherche d’une issue à la crise, ce qui n’empêche pas les contacts diplomatiques de se poursuivre. Le secrétaire d’État américain John Kerry s’est dit prêt à se rendre dans la région. La ministre italienne des Affaires étrangères Federica Mogherini, candidate au poste de chef de la diplomatie européenne, achève mercredi une visite de moins de quarante-huit heures à Ramallah, Jérusalem et Ashdod. Le président palestinien Mahmoud Abbas devait se rendre en Turquie, alliée du Hamas, puis en Égypte. L’émir du Qatar, cheikh Tamim Ben Hamad Al-Thani, un des principaux soutiens arabes du Hamas, s’est, lui, entretenu mardi à Ankara avec les dirigeants turcs. Le premier ministre turc Recep Tayyip Erdogan a accusé Israël de "terrorisme d’État" et de perpétrer un "massacre" parmi la population civile, excluant toute normalisation des relations de la Turquie avec l’État hébreu.

 Le curé de Gaza observe la « résignation » de la population

Curé de la paroisse latine de Gaza, le P. Jorge Hernandez a publié, le 11 juillet, une lettre sur sa page Facebook, reprise hier par le Patriarcat latin de Jérusalem, dans laquelle il évoque la situation sur place. « Le profil habituel de la guerre ici est désormais connu par la population : avions, explosions, destructions et mort, écrit ce prêtre d’origine argentine, membre de l’Institut du Verbe incarné. (…) La seule chose qui a déstabilisé ces prédictions fut de se retrouver face à une résistance à plus grande échelle. »

Dans sa lettre, le P. Hernandez relate aussi la « crainte bien fondée d’une réaction à l’intérieur de la bande de Gaza contre les chrétiens »odus operandi observé ailleurs », avance-t-il, qualifiant d’« admirable la résignation des gens, (…) confiants dans les mains de Dieu seul ». « Priez pour nous afin que soit mis un terme à cette folie », conclut sa missive.

François d’Alançon